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Guiako Obin (Baby Lab): Les Fab Lab sont des écoles de la seconde chance

Guiako Obin est co-fondateur du Baby Lab, un tiers-lieu dédié à l’apprentissage du numérique pour des populations défavorisées dans la commune d’Abobo, à Abidjan en Côte d’Ivoire. Dans cette interview, il explique comment les Fab Lab africains apparaissent aujourd’hui comme un complément à l’enseignement traditionnel.
Guiako Obin est co-fondateur du Baby Lab, un tiers-lieu dédié à l’apprentissage du numérique pour des populations défavorisées. Dans cette interview, il explique comment les Fab Lab africains apparaissent aujourd’hui comme un complément à l’enseignement traditionnel.

– Quel est votre parcours personnel ?
Je suis Co-fondateur et Président du Baby Lab, le fab lab de la commune populaire d’Abobo. Informaticien de formation, j’ai travaillé quelques années dans le réseau GPS où j’assurais le support technique d’une plateforme de géolocalisation. Je fais partie des 34 Jeunes Leaders Africains du programme BSF Campus de Bibliothèques Sans Frontières dont le but est d’inventer les bibliothèques de demain dans les pays d’Afrique francophone. Je suis Ambassadeur représentant la Côte d’Ivoire au programme Next Einstein Forum de l’Institut Africain des sciences et des mathématiques basé en Afrique du sud qui promeut l’innovation scientifique et technologique africaine sur la scène mondiale.

– Comment est née l’idée du Baby Lab ?
Nous avons découvert le concept des Fab Lab en 2014 grâce au MOOC  » Fabrication Numérique  » qui était proposé par l’Institut Mines et Télécom de France. Nous nous sommes ensuite posé la question de savoir quelle pourrait être la réalité d’un fab lab africain, et plus spécifiquement dans un contexte ivoirien. C’est ainsi qu’est né le Baby Lab d’Abobo ; pour mener un modèle de développement qui part des quartiers populaires pour développer de la socialisation dans un contexte de pauvreté et précarité extrême.  » Baby  » est le surnom de la ville d’Abidjan et  » Lab  » désigne un terme anglo-saxon qui signifie laboratoire ou espace ouvert à tous. Le Baby Lab peut donc aussi se définir comme le laboratoire d’Abidjan faisant la promotion de la fabrication numérique et des logiciels libres.
– Comment vous situez-vous par rapport à OvillageCI, autre Lab d’innovation sociale de la ville d’Abidjan ?
Tous les espaces d’innovation d’Abidjan ont à cœur la transformation du territoire par le numérique et l’innovation sociale. La différence est que le Baby Lab inscrit sa démarche dans les quartiers populaires et élabore des modèles d’éducation au numérique pour les moins de 15 ans.


-L’équipe permanente est constituée de combien de personnes ?

L’équipe régulière et permanente compte une vingtaine de personnes.
-Quels sont les chiffres clés du Baby Lab, notamment en termes d’impacts sociaux ?
Aujourd’hui notre communauté active compte un peu plus de 50 personnes, alors que nous étions une dizaine au départ. C’est plus d’une centaine d’adolescents qui se sont formés au code informatique, à l’électronique et la robotique. 2 adolescents ont reçu des ordinateurs de la part de leur parent suite à leur fréquentation de l’espace Baby Lab. Nous avons organisé une vingtaine d’ateliers pour la promotion de l’open source et les logiciels libres. En cette rentrée 2016, nous collaborons avec 2 établissements de la commune d’Abobo pour l’animation d’ateliers créatifs numériques avec les élèves.

-Quels enseignements tirez-vous de votre activité ?
L’enseignement que je tire à ce jour est que les initiatives sociales développent nécessairement le leadership et rendent intellectuellement indépendant. On a là un réservoir d’idées d’entreprises pour un changement global.

-Quel regard portez-vous sur l’enseignement « classique » de l’informatique et des sciences de l’ingénieur dans les universités et les écoles en Côte d’Ivoire ?
Il est de notoriété publique qu’après la formation dans l’enseignement classique, les apprenants sentent toujours le besoin de se faire former, et les entreprises également estiment qu’il y a besoin de compétences. Entre l’école et l’entreprise on observe une phase transitoire problématique. C’est la question de l’emploi et de l’auto-emploi dont les solutions sont difficiles à trouver. En attendant que les écoles soient mieux équipés et les enseignants plus compétents sur les nouveaux enjeux, il y a urgence de développer les tiers lieux ou fab lab qui sont d’autres lieux d’éducation à cheval entre les écoles et les entreprises, pour mieux répondre aux attentes des employeurs et développer l’entrepreneuriat au plan national.
Ces espaces révélateurs de talents peuvent être considérés comme des écoles de la seconde chance pour ceux qu’on qualifie de « dernier de la classe « . La mobilité, le télétravail, la formation à distance, le travail collaboratif et la philosophie de l’open source doivent aujourd’hui gagner l’écosystème de notre système éducatif, pour gagner du temps, faciliter l’accès à la formation quelle que soit la zone géographique des apprenants, favoriser la collaboration et l’innovation.

-Quel pays d’Afrique vous semble le mieux avoir intégré l’innovation ouverte/l’innovation frugale dans la formation de ses ingénieurs ?
L’innovation frugale et ouverte dans la formation en Afrique laisse à désirer. Mais les pays comme le Maroc, le Sénégal, le Nigéria, le Rwanda et le Kenya ont un écosystème assez développé pour parvenir à cela à court terme. Des projets sociétaux en faveur du numérique ont vu le jour ces dernières années dans ces pays. Ces nations sont des modèles pour inspirer le reste du continent.
-Avez-vous eu l’opportunité de présenter le Baby Lab aux pouvoirs publics, pour un éventuel soutien ?
Pas encore officiellement mais un projet du Baby Lab est lauréat d’un concours d’innovation initié par le gouvernement Ivoirien. Nous sommes toujours dans la démarche pour mieux nous faire connaître auprès des collectivités locales et des pouvoirs publics.

-Les inventions du Lab ont-elles vocation à devenir des produits qui seront industrialisés et commercialisés un jour, ou sont-elles justes des prototypes qui servent de support de formation ?
Le Baby Lab est un fab lab qui se penche beaucoup plus pour l’instant sur l’éducation au numérique. Nous avons expérimenté un modèle depuis maintenant deux ans qui peut être déployé pour un public plus large, voir national.
-Comment voyez-vous le Baby Lab évoluer d’ici 1 à 2 ans ?
Nous aimerions devenir un laboratoire de formation pratique pour les établissements de la commune d’Abobo. Et nous comptons démultiplier ce modèle sur d’autres territoires en Côte d’Ivoire et en Afrique.
système assez développé pour parvenir à cela à cours terme. Des projets sociétaux en faveur du numérique ont vu le jour ces dernières années. Ces nations sont des modèles pour inspirer le reste du continent.

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